Balades de FleePee





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Chez les Ibères en Hiver...
Le Retour!

18-29 Janvier 2024


Septième Jour:
Gorafe, me voilà!

 

    5h30... je suis réveillé, et je n'ai pas passé une très bonne nuit...
J'essaie de me rendormir, en vain, alors je prépare le premier café, 25 minutes après mon réveil...
Il fait bien bien frais, avec du vent, alors c'est dans la tente que je le prépare... je constate qu'il faut 3 fois moins de temps pour que le café soit prêt que si je le prépare dehors... j'ai suffisamment d'espace, la tente est une trois places, un vrai palace! Il me faut juste être bien vigilant sur l'ampleur de mes mouvements pendant que le réchaud est allumé.
C'est l'heure d'une nécessaire toilette; j'ai gardé pour dormir le T-shirt que je portais hier et je pue grave!
8h15... Je suis paré au départ!

    Je me régale sur tout le début du parcours.
Restant sur la piste principale, je me rends compte en jetant un oeil au GPS que le tracé du TET a bifurqué une trentaine de mètres auparavant... je n'ai pas vu d'intersection nette en roulant. Je fais demi-tour pour récupérer la trace... je ne suis pas très inspiré par la direction qu'elle prend: il faut que j'escalade un petit talus et derrière ce n'est pas vraiment une piste que je vois; c'est une zone plate de dalles rocheuses, tapis de caillasses, ça semble être sablonneux aussi... je me prépare à grimper, mets un peu de gaz en prévision du talus à passer et de la montée derrière, en me disant que derrière ce passage, c'est peut-être mieux...
Que nenni!
Je freine pour vite m'arrêter tant que j'ai la place de faire demi-tour!

    Franchement, non...
Ce n'est certainement pas tout seul que je vais m'aventurer là-dedans... et même accompagné, il y a de quoi hésiter!
Je me fais un peu chier pour faire demi-tour, avec 2 petites chaleurs au menu... le seul point positif, c'est que donc j'ai maintenant très chaud!
Revenu sur la piste principale, je fais un point sur le GPS: la piste débouche sur une toute petite route de campagne qui me permet de faire une boucle avant de retrouver le tracé du TET de l'autre côté de la colline.
Je retrouve donc des pistes très sympa quelques minutes plus tard.
Le coin est magnifique dans la lumière du soleil levant!

         

    Au creux d'un vallon, je tombe sur une belle nappe de brouillard, la rosée a givré la végétation...
Je poursuis et atteins une autre bifurcation de la trace: elle part en montant avec une belle pente sur un épais tapis de gravier... Mouais, bof...
    Comme tout à l'heure, je ne vais pas me lancer tout seul là-dedans... je reste sur la piste principale.
Quelques centaines de mètres plus loin, je me dis que je suis peut-être frileux et timide, que ce n'est peut-être pas si terrible que ça, que j'ai peut-être tort d'avoir fait l'impasse sur cette partie... j'y retourne pour en avoir le coeur net.
Mais finalement, j'avais bien raison... car si je n'arrive pas à monter, que je ne me mets pas par terre en essayant de le faire, un demi-tour en montée dans cette épaisseur de gravier risque d'être bien rock'n roll: car si j'en crois la profondeur et largeur des traces de passages de motos, de plus en zigzag sur la largeur de la piste, c'est très très mou!
Encore une fois, je rebrousse chemin en me disant que je récupérerai la trace plus loin...
Pffff... ça me soûle!

    Histoire de penser à autre chose, je décide de m'arrêter dès que possible:
l'alimentation de mon GPS se coupe de nouveau régulièrement...
9h45, je m'arrête donc au soleil pour reprendre et tenter de parfaire mon bidouillage... je vire le scotch, vérifie que les fils soient bien en contact, ajoute un petit bout de branche contre eux pour rigidifier le montage... ça fonctionne, et même en tripatouillant le câble, je n'ai plus de coupure... Bon... ça, c'est fait!

    

    Je retrouve le tracé, c'est très sympa!
J'enchaîne les bornes sur ces pistes et petites routes de campagne.

         

    

    J'arrive sur les hauteurs après Inazares.
J'ai faim, même s'il n'est que 11h20, et d'après mon GPS je suis à 20 kilomètres de la fin de cette section du TET, et donc de Gorafe et son désert, que j'ai mis en point de mire de mon périple. Il me tarde d'y arriver!
Je grignote rapidos pour récupérer un peu d'énergie; je n'ai que du café dans le bide depuis ce matin...
Je suis à la fois euphorique et détendu à l'idée d'être si proche de me retrouver à Gorafe... je reprends les pistes en me demandant à quel moment je vais enfin apercevoir ce désert, qui a l'air d'être assez étendu... pour le moment, je n'ai rien vu qui évoque les paysages érodés que j'ai visualisés sur le net avant de partir, et je m'attends à tomber dessus à chaque fois que je sens qu'un nouveau panorama peut apparaître... au détour d'un virage, d'un passage à un col... mais rien, nada!
Heureusement qu'en attendant de tomber sur mon graal, je me régale!

         

    

    Les pistes sont superbes!
Régulièrement je vois apparaître la sierra Nevada enneigée au loin.
Elle se détache du paysage en luisant au soleil, comme un phare gigantesque veillant sur toute la région. 
Mais toujours point de désert à l'horizon!
Cela commence à franchement me faire douter, pour ne pas dire que je n'y crois plus du tout, alors que je ne suis plus qu'à quatre kilomètres de la fin du tracé...
Et plus j'avance, plus la piste devient étroite, chaotique, sinueuse, tout en s'enfonçant dans une pinède basse... je ne progresse plus qu'en première et en seconde...
Je n'aime pas du tout mon impression du moment, celle d'être un gros jambon coincé au milieu de petits pins...
Lorsque j'arrive au bout du tracé, je suis en proie à une totale incompréhension: je croyais arriver dans une petite ville, un village, et je me retrouve au milieu de nulle part, en pleine forêt, sur une piste superbe pour un enduro, mais un peu pénible pour un gros trail chargé... cette section du TET s'arrête là:

    Franchement, j'hésite à m'engager dans cette descente...
Je consulte mon GPS, puis Waze sur mon téléphone...
Damned! Gorafe est à 125 kilomètres!
Aucune idée de pourquoi je me suis mis en tête que cette section du TET s'y arrêtait, j'étais persuadé l'avoir lu sur mon GPS, mais ça devait être sans mes lunettes... oh, misère!
Je n'ai que deux options: faire demi-tour ou charger dans mon GPS et emprunter la section suivante du TET...
J'en ai un peu marre de faire des demi-tours, en plus celui-ci va être très compliqué, et de toute façon ça fait un moment que je n'ai pas vu d'intersection qui me permettrait de prendre une autre direction pour contourner cette partie délicate... je choisis donc pour une fois de n'écouter ni mon instinct, ni Mohamem, et je m'engouffre dans la descente.
    Quelle erreur et quel enfer!
S'en suivent 45 minutes très intenses et stressantes, sur des pistes complètement défoncées, pleines d'ornières, de marches à descendre, de grosses pierres, des montées tout aussi chaudes... Je me fais quelques frayeurs et une bonne suée!
Sur le GPS, j'avais vu une info comme quoi il y a un gué qui peut se retrouver inondé... autant, c'est là que l'allemand rencontré hier s'est embourbé... je décide de prendre la première piste que je verrai qui me fera quitter cette trace... j'en ai vu qui rejoignent une route, et il faut que je me sorte de ce merdier avant que je ne me jette dans un autre!

    Au moment où j'écris ces lignes, je peux bien sûr dire que ce n'était pas une si grosse erreur que ça que de continuer sur cette piste, puisque j'ai pu en sortir sans dammage ni bobo... mais ce n'était vraiment pas une décision intelligente: vu le coin, si j'avais eu un problème et besoin d'Ed, j'aurais pu crier longtemps: il ne serait jamais venu!
Mais bon... il ne s'est rien passé et c'est tant mieux!

   
    Mais quel soulagement quand j'atterris enfin dans des vergers!
Enfin! Des pistes rectilignes et horizontales!
Sous l'emprise de l'adrénaline, j'ai envie d'accélérer comme un bourrin, mais je m'en rends vite compte et refrène mes ardeurs... ce serait trop con de s'en prendre une ici!

    Je me pose à l'ombre dans un chemin de l'autre côté de la route.
J'ai de nouveau très faim, il est 13h30. J'ai vu en arrivant que sur la colline au-dessus de moi, il y a un petit village, je vais y aller, histoire de voir si je trouve une possibilité pour manger.
Au bout du chemin, je tombe sur une station service, mais plus de super.
Sans donc m'y arrêter, je passe les pompes de la station et me rends compte qu'il y a peu après quelques véhicules garés devant un bâtiment... je m'en approche et découvre un grand restaurant routier...
Hop!
Un coca, de gros filets de poulet braisés, et des frites pas cuites (Beurk!)... ça fait du bien de manger et de se poser un peu!

    Comme je suis têtu, pour digérer, je pars rejoindre la suite du tracé du TET...
Et puis rebelote: je me régale pendant des bornes, jusqu'à ce que j'arrive à une bonne montée bien défoncée...
Cette fois-ci, j'écoute illico mon instinct et fais demi-tour...
Prendre le risque d'une sortie de piste côté ravin, ce n'est pas quelque chose que j'envisage!
J'avais autre chose à faire que prendre une photo, et surtout je n'ai pas pu lâcher le guidon, alors aucune image de l'endroit!
    De nouveau, je suis frustré de ne pas poursuivre sur cette piste!
C'est dommage, car c'était encore une fois vraiment sympa jusque là...
Je me fais donc une belle boucle, et me pose à 15h20 à la sortie de ces pistes.

         

    Je récupère une double-voie et son ennui pendant plus d'une heure...
Et puis enfin, après une longue ligne droite bordée de vergers sur un plateau aride, et comme je l'avais imaginé plus tôt, 
c'est effectivement sans prévenir qu'au détour d'un virage plongeant dans une gorge je suis en vue de Gorafe et de son désert!

Youhou!

    J'y débarque peu avant 17h.
Je m'attendais à voir un village décor de carte postale, et ce n'est pas vraiment le cas; c'est un pueblo presque banal...
Je fais quelques courses au supermercardo, dès son ouverture, je n'ai que trois minutes à attendre, il ouvre à 17h.
Quatre très belles tranches bien épaisses de jambon cru, un bon bout de fromage local, un gros gâteau maison citron/amandes, trois bananes, deux bières fraîches, un pain, un paquet de tabac et des feuilles à rouler, pour 13€!
Je me demande après coup s'il ne s'est pas planté... (non, c’est moi qui me plante… c’est en deux fois que j’ai pris tout ça; j’y suis retourné le lendemain… mais ce n'était pas cher quand même!)

    

    J’ai envie de dormir dans, ou en ayant une belle vue sur le désert...
Je charge dans mon GPS une trace que j'ai téléchargée avant de partir, qui le parcourt.

Je suis le tracé et monte au-dessus du village me trouver un spot de bivouac, ce qui se trouve être très rapide!

    

    Hop! Ce sera là, mon bivouac du jour!
Un promontoire: "El puntal de Don Diego". Avec un Don Diego de la Vega, j’aurais peut-être pu voir Zorro surgir hors de la nuit, courir vers l'aventure au galop!
    Bon d’accord… le sol dur est recouvert de pierres et de gravier, et j’ai quelques voisins, mais le coin est quand même paisible et terrible! Hormis un couple qui décide d’aller au bout du promontoire pile au moment où j’y arrive, personne ne viendra me rendre visite par la suite…



    

    Je profite des dernier rayons de soleil pour sécher un peu ma tenue moto et mes affaires de couchage, comme j'en ai pris l'habitude, et installe prestement mon campement… je suis bien rodé!
J’ai à ma disposition une vue quasiment à 360° sur le désert… les camping-cars (il y en aura 6 en tout) sont stationnés au bord de la piste, au-dessus de la falaise bordant le village de Gorafe.
J’ai vue sur tout le reste, et franchement... ça en jette!

         

    La vue depuis ma chambre est fabuleuse… il paraît que tout ce désert était autrefois un fond marin… c’est bien sec désormais!
Le soleil se couche et un petit vent se lève, il fait rapidement bien frais et je me couvre.
Posé sur un rocher, dominant un canyon où les croassements de deux oiseaux noirs résonnent (ils ressemblent à des choucas…), en guise d’apéritif, je savoure ma bière du soir tout en dégustant en même temps la vision de l’horizon, qui à l’est se colore un peu, avec dans le ciel la pleine Lune qui se lève, ainsi que la vision de l’horizon qui à l’ouest se colore beaucoup, avec le soleil qui se couche. Ces vastes étendues façonnées par des millénaires d’érosion se teintent d’ombres et lumières magnifiques et changeantes au fur et à mesure que la nuit tombe. Je profite à fond de ces instants magiques. Pour rétablir quelque peu l’équilibre rompu par ce trop plein de visions poétiques, je pisse au vent dans le canyon depuis mon rocher. Les deux me font grand bien!

         

    La nuit n’est pas totalement noire car le désert est éclairé par la pleine Lune...
Je me régale d’une simple salade en boîte agrémentée de pain, les yeux happés par ces paysages. Par ailleurs, le gâteau bien gras citron/amandes est une véritable tuerie, qui alimente autant mon organisme que ma gourmandise…
    Finalement j’ai eu droit à un visiteur, mais il n’était pas humain…
Alors que je reviens vers ma tente, lampe frontale éteinte, arrivent en ondulant vers moi une ribambelle de petites lumières jaunes. J’ai un moment d’arrêt, arrêt de ma marche et de ma respiration, avant de comprendre qu’un chien tout noir passe en toute discrétion à un mètre de moi, équipé d’un collier muni de leds… je le suis, histoire de ne pas le laisser pisser sur ma tente… dès la nuit tombée, les camping-caristes se sont réfugiés au chaud de leur maison roulante et je n’ai plus vu âme qui vive jusqu'au lendemain matin...
    Bon, c’est bien beau tout ça, mais je suis vanné, il fait froid dans le vent, alors il est temps de me caler dans la tente pour faire un gros dodo!
Je n’ai rien à faire de mieux!

   Vivement demain!

Demain est un autre jour!


Itinéraire Jour 7: 252 km, 9h15

       
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